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Suivi et propulsé par Jean Fournier, c'est aux côtés de Sam Francis et Joan Mitchel que Guillaume Lebelle participe à la FIAC en 2001 soit peu de temps après sa sortie des Beaux-arts. Entre mémoire, histoire et tradition, sa peinture se situe dans l’héritage de l’abstraction ou plutôt en rappelle les racines. On pense d’abord à Kandinsky, à ses séries d’Impressions et d’Improvisations. Tant par les formes que par les couleurs, Lebelle aussi recherche les rythmes, la juste cadanse. Son touché est sensible, s’applique à « attraper de l’autour » pour reprendre ses mots. Libérée du châssis, la toile offre de nouvelles potentialités et conserve les traces de cette mise en danger, -l’exacte maladresse-. De hasards en signes, la partition est libre, les métamorphoses opèrent. On pense alors à Bataille qui, évoquant Lascaux comme berceau de l’abstraction, parle de surfaces presque mouvantes. Mais l’éphémère gagne parfois du terrain et vient s’incarner via le collage (de plus en plus présent dans ses dernières toiles) avant de prendre vie dans des installations à peine bancales. Dans une poétique du

bricolage, Lebelle joue des prélèvements bruts, d’une teneur plus expérimentale, comme des bouts de réel qui ressurgissent soudain.

Ce n’est pas loin du sentiment que l’on peut éprouver face au travail de Treppoz, à la différence près, qu’il évoquerait davantage le Réel au sens lacanien du terme : celui de l’indicible, de l’avant ; du visqueux et des fluides. D’une génération antérieure à celle des deux autres artistes, Treppoz, en autodidacte, a rapidement été soutenu par Antoine de Galbert, fondateur et président de la maison rouge. On sait aussi sa proximité et son affinité pour Ughetto avec lequel il a mené de brillants entretiens. La série des Paysages, qu’il présentera lors de cette exposition, est faite de cette matière grouillante, agitée, agitante, qui révulse autant qu’elle attire : un chaos en mutation ou la danse effrénée d’Eros et Thanatos. Procédant par accumulations et saturations, les règnes se mélangent dans une croûte épaisse, comme autant de méandres qui s’adoucissent au loin. La matière a sa propre intelligence, elle panse. Treppoz évoque Wols. Tenant de l’abstraction lyrique, il n’anticipait jamais la forme mais la laissait émerger d’une trituration de la matière, laissant ainsi sa place au hasard. Dans un principe tout sartrien, il nous rappelait que l’existence précède l’essence. Qu’est-ce qu’il y a avant ? Qu’est-ce qu’il y a derrière ? Treppoz nous invite à une archéologie qui irait de l’intime à l’extime ; un all over revisité. On peut supposer que Bachelard aurait apprécié qu’il nous laisse là, au seuil de cette « matière imaginante ».

 

Laetitia Blanchon, octobre 2016